Familienrezept nach alter Art / Pour faire une famille

Deutsche Version in: DUM, Das Ultimative Magazin,
Thema: « RATSCHLAG »,
Jahrgang 17, No.: 69/2014

Man nehme einen Vater, der Kraft, Strenge und Autorität verkörpert, und ein Muster an Zärtlichkeit, Vorsicht und Weisheit als MutterDie Zutaten auf Liebe betten, mit einer Prise Leidenschaft und einer Messerspitze Lüsternheit bestreuen und ziehen lassenDie Mischung in ein Gefäß gießen
In regelmäßigen Abständen Rebellionen, Träume, Groll, Bitterkeit und Alltagsschaum abschöpfen
Ein wenig Unschuld, Treuherzigkeit, Lebensfreude, Naivität und Vertrauen in einem Teelöffel Zitronensäure auflösen
Die Mischung zugeben und jahrelang ruhen lassen
Normalerweise bildet sich an der Oberfläche eine Schicht Dankbarkeit und Pflichtgefühl
Die Zugabe von Streitigkeiten, Nörgeleien, Seufzern, Tränen, Geheimnissen und Tabus bewirkt eine leicht bittere Note
Je nach Geschmack einen Hauch von Religiosität oder Scheinharmonie beimengen, und nach Belieben
mit Fetischen,
einem Bauernschrank,
einem alten Sessel,
einem Schmuckstück,
einem Fotoalbum versetzen,
wahlweise auch
Bohnerwachs, Staub oder Schmieröl ins Feuer gießen…
Jahrelang täglich umrühren
Nach abgeschlossenem Gärungsprozess die Mischung pürieren (auf die Finger achten) und durch ein grobes Leinentuch passieren
Das Leinentuch waschen (nicht in der Öffentlichkeit)
Die Mischung mit Bittersäure legieren
Nach Geschmack würzen
Auf schwacher Flamme zum Köcheln bringen und eindicken
Das Gericht flambieren, in der Gascogne mit Armagnac, im Dauphiné mit Chartreuse
In Flaschen füllen und im Keller lagern
Anschließend den Rest der Flasche Armagnac oder Chartreuse austrinken und mit Freunden ausgehen

Pour faire une famille [recette à l’ancienne]

Prenez un père qui incarne force, rigueur et autorité et une mère qui soit un parangon de tendresse, de vigilance et de sagesse
Préparez une décoction en les mettant à infuser dans un lit d’amour, que vous saupoudrerez d’un zeste de passion et d’un soupçon de lubricité
Mettez la préparation dans un récipient
Fermez bien le récipient pour éviter que ne se forment à la surface rébellions, fantasmes, rancœur, amertume ou écume des jours
Dissoudre un peu d’innocence, de candeur, de joie de vivre, de naïveté et de confiance dans une cuillère d’acide
Ajoutez à la décoction et laissez reposer pendant plusieurs années
Il doit normalement se développer à la surface une couche de gratitude et de sens du devoir

Au fil des ans, ajoutez à froid disputes, murmures, soupirs, larmes, secrets, tabous. Pour l’amertume, cela s’entend
On peut y ajouter, à l’envi, quelque relent de religiosité ou simulacre d’harmonie,
des fétiches,
un bahut,
un voltaire,
un bijou,
un album de photographies (le père sur son cheval ou en train de fumer la pipe),
de l’encaustique et de l’huile de coude,
ou de la poussière…
Remuez tous les jours pendant des années
En fin de fermentation, passez à la moulinette en prenant soin d’épargner vos doigts puis filtrez la préparation à travers un linge
Lavez le linge en famille
Ajoutez une liaison d’aigreur et de ressentiments et arrosez-en votre préparation
Épicez à votre goût
Mettez sur le feu. Faites frissonner puis laissez réduire
En Gascogne, on flambera à l’Armagnac ; dans le Dauphiné, à la Chartreuse
Versez dans des bouteilles. Couchez-les à la cave où la préparation se conservera très longtemps
En remontant de la cave, finissez la bouteille d’Armagnac (ou de Chartreuse, selon votre origine) et sortez avec des amis